Cette disposition réglementaire est une petite révolution.

Vérification du permis

La vérification de la validation du permis de conduire des salariés par les employeurs.

Redouté par certains, attendu par d’autres, le journal officiel de février 2024 ouvre la possibilité aux employeurs de certaines entreprises de pouvoir vérifier la validité du permis de conduire des salariés qu’ils emploient. C’est une révolution dans l’espace numérique et des données personnelles.

Le contexte de l’employeur

Jusqu’à présent, un employeur qui confiait un véhicule à un salarié, se trouvait face à un risque majeur, celui que le conducteur, officiellement titulaire de son permis, n’en soit privé ou déchu sans qu’il n’en fût averti. Cela pouvait avoir de lourdes conséquences en termes de responsabilité. Parmi celles-ci, le risque de se voir reprocher d’avoir confié cet “outil de travail” à un conducteur dont le permis n’est plus valable ou celui de se voir refuser l’indemnisation de l’assureur en cas de sinistre.

La loi ne lui permettant pas de vérifier la validité du permis de façon officielle, il devait avoir recours à un ensemble de dispositions organisationnelles diverses, en fonction de l’histoire et de l’organisation de son entreprise. Parmi celles-ci :

  • La vérification périodique du permis au moyen d’une photocopie recto verso datée et signée par le conducteur, dûment conservée par un service habilité jusqu’au départ du salarié.
  • L’ajout dans le contrat de travail d’obligation d’information de l’employeur en cas de perte du permis
  • L’incitation à l’autosurveillance du nombre de points par le salarié en l’assurant d’une prise ne charge partielle d’un stage de récupération de points
  • La déclaration sur l’honneur du salarié qu’il est toujours en possession du permis de conduire

Quelles que soient les dispositions prises, l’employeur ne peut que montrer sa “bonne volonté” et son attention à ce sujet. En effet, la plupart des dispositions relevant du déclaratif et étant périodiques, elles ne peuvent garantir à 100% que le conducteur est toujours en possession d’un permis en cours de validité lorsqu’il utilise un véhicule de l’entreprise. In fine, les dispositions prises sont essentiellement dissuasives, accompagnatrices ou démonstratives de la bonne volonté en cas de recours juridique.

Qui est concerné ?

Désormais et sous conditions, l’employeur pourra vérifier directement auprès des services de l’état la validité du permis de conduire de ses salariés. Ces conditions portent en premier lieu sur le secteur d’activité, car l’article 1 en donne une liste exhaustive :

  • Toute entreprise de transport routier public de personnes et/ou de marchandises :
  • Livraison
  • Transport de marchandises
  • Transport public de personnes
  • Transport sanitaire
  • Déménagement
  • Transport de fonds
  • Etc.

Pour les autres entreprises, ce service n’est pas accessible, elles restent donc avec les dispositifs évoquées plus haut.

Ce service accessible sur internet ( https://www.verif.permisdeconduire.gouv.fr/home ) nécessite une inscription préalable de l’entreprise et la transmission d’informations détaillées sur les conducteurs dont l’employeur souhaite vérifier la validité du permis. Ce service est payant et coûte 40 € HT et un droit de 0.95 HT par consultation (appelé jeton). Il n’y a aucune limitation du nombre de consultations réalisables, par conducteur et par an.

Quelles conséquences cela a-t-il ?

Pour pallier aux défauts des vérifications déclaratives mentionnées plus haut, on peut avoir l’idée de revenir fréquemment vérifier la validité du permis sur ce nouveau service. Fréquemment, ne veut pas dire “en permanence” évidemment, ce qui laisse encore la possibilité qu’un conducteur perde son permis entre deux vérifications. Ce que cela change en revanche, c’est qu’il s’agit d’une information officielle, vérifiée et donc opposable.

Car il est là en fait le fond du problème, l’aspect juridique. Si auparavant il n’était pas possible d’affirmer que ce que déclarait le salarié était exact ou non, aujourd’hui, une information objective est accessible. Puisqu’elle est accessible techniquement et financièrement, elle sera donc appelée à être “l’élément de preuve” attendu en cas de mise en cause de l’employeur. Ce qui change, c’est que petit à petit ce dispositif deviendra incontournable pour montrer que l’employeur “prends au sérieux” et porte toute son attention au fait que seuls des conducteurs disposant d’un permis en cours de validité conduisent leurs véhicules.

Toutefois, cela ne règle pas la question de l’assureur qui factuellement continuera certainement à ne pas couvrir un sinistre, si un conducteur s’avère être en invalidation ou en suspension du permis.

Pour limiter le risque de ne pas “voir” trop tardivement la perte d’un permis, l’employeur pourrait souhaiter augmenter la fréquence des vérifications. Sans pour autant obtenir une garantie totale.

Références : Arrêté du 15 février 2024 pris en application de l’article R. 225-5-1 du code de la route” .
NOR : IOMS2405878A

Quelles évolutions possibles ?

Cette mesure est à rapprocher de la lecture automatique de l’existence d’une assurance pour le véhicule à partir du fichier des immatriculations par exemple. En effet elles marquent toutes deux comme bien d’autres, l’ouverture de bases de données dans un monde ou le numérique permet toujours plus de rapprochements et de vérifications.

Si en l’espèce cela semble utile à l’entreprise, il conviendra de vérifier si ce mode de preuve ne risque pas de la desservir. Comme évoqué plus avant, l’information de la validité étant ponctuelle, il sera difficile d’opposer que l’on a vérifié une ou deux fois par an la validité du permis, alors que le conducteur se trouve être en suspension ou en invalidation quelques semaines plus tard.

On peut ensuite s’attendre à une généralisation de ce service à tous les secteurs professionnels. En premier lieu, parce qu’il y a force d’égalité de droits pour les entreprises et , en second lieu, parce qu’un service de ce type pourrait être aussi utile pour les flottes techniques ou de commerce, par exemple.

Il reste un défaut technique à cette démarche de vérification à l’initiative de l’entreprise, c’est qu’elle n’a de valeur que ponctuellement et qu’elle ne solutionne pas complètement la question de la responsabilité de l’employeur, ni du tout, celle du risque assurantiel.

Une évolution imaginable et utile, serait que l’employeur indique les conducteurs qui sont concernés par cette vérification sur ce service et qu’une information automatique, par mail, soit faite à l’entreprise lorsque l’état de validité du permis de conduire d’un conducteur, change. Ceci permettrait à l’employeur de prendre des dispositions à temps et lui assurer une information actuelle pertinente. Peut être dans une version ultérieure.

Enfin, tout ceci ne dispense pas l’entreprise de réfléchir et anticiper la situation de perte de permis ou de suspension pour ses collaborateurs, de prévoir les conditions de reclassement et surtout de travailler avec toutes les équipes sur la prévention du risque routier dont la perte de permis, n’est qu’une des conséquences fâcheuses tant pour l’entreprise que pour le salarié.

Alain Wucher – Président du GP2R

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